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EDITORIAL : Coûts de la santé privé ou publique, à la fin c’est nous qui payons

SAO PAULOLe célèbre médecin brésilien, le Dr Drauzio Varella, écrit dans un éditorial très intéressant du journal Folha de S.Paulo du samedi 26 novembre 2016 que les dépenses de santé sont la responsabilité de chacun et notamment du patient. Il pointe du doigt l’explosion au Brésil du nombre d’examens demandés par les médecins, mais souvent sous la pression des patients. Au Brésil, le médecin réalise des examens comme une prise de sang ou des radiographies rarement dans son cabinet mais les externalise à des sociétés de diagnostic. De la même façon qu’un patient n’aime en général pas ressortir du cabinet sans un médicament, de nos jours les patients exigent aussi une batterie d’examens et tests souvent très onéreux comme des tomographies ou d’autres radiographies. 

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Système de santé brésilien, publique vs. privé

ministerio-da-saude-bresilLe Brésil est un pays très intéressant au niveau de son système de santé, c’est un peu un mélange entre le système français et américain. Au Brésil, le SUS (Système Unique de Santé) est l’équivalent dans un certain sens de la Sécurité sociale française, c’est-à-dire que chaque résident au Brésil a droit de façon gratuite (payé par les impôts), sans franchise, à différents services de santé.
Mais comme le SUS présente de nombreux problèmes qu’on retrouve d’ailleurs dans une moindre mesure au Royaume-Uni, les principaux étant un manque de qualité des soins ainsi que beaucoup d’attentes, des dizaines de millions de Brésiliens surtout de la classe moyenne et de la bourgeoisie prennent une assurance maladie (plan de santé) qui est la plupart du temps payée par l’employeur. Dans ce sens, le système brésilien se rapproche de la logique américaine, sans mentionner ici « Obamacare » ou Medicare qui suivent eux une logique plus « française » et étatisée.
Pour citer un seul chiffre, le SUS compte plus d’1 milliard de rendez-vous par année pour une population d’environ 205 millions d’habitants, comme si chaque Brésilien se rendait plus de 5 fois par année chez un médecin ou un fournisseur de soins.

90% des examens sont normaux !

hépatite C transfusionLe Dr Varella mentionne qu’un grand laboratoire d’analyse de la ville de Sao Paulo, plus grande ville du Brésil et du continent américain avec environ 12 millions d’habitants, compte 90% d’examens avec des résultats normaux. C’est la preuve, même s’il faudrait probablement se pencher plus en détails sur chaque résultat, que beaucoup de médecins demandent aux patients d’effectuer de nombreux examens sans véritable nécessité scientifique comme ils sont en grande partie normaux.
Pour le médecin brésilien, beaucoup de médecins de son pays trouvent plus facile d’envoyer le patient réaliser plusieurs examens plutôt que d’évaluer directement la douleur au cabinet ou d’effectuer des palpations au niveau de l’abdomen. Bref, le retour d’une certaine « médecine à grand-papa » pourrait aussi présenter des intérêts sur les coûts de la santé sans toujours compter sur la médecine (hyper)technologique.

Les coûts explosent

Ce que relève à juste titre le Dr Varella dans son analyse sur l’explosion du nombre d’examens et tests de diagnostics au Brésil, qui connaît très bien le système de santé de son pays, est qu’à la fin autant pour le système publique que privé (plans de santé), c’est le citoyen ou contribuable qui paye d’une façon ou d’une autre. Il remarque qu’au Brésil désormais la principale dépense des entreprises après les salaires du personnel, est le payement de l’assurance maladie pour les employés. Cette dépense est un frain à l’augmentation des salaires des employés.
Un média de référence au Brésil, Exame, estimait en 2016 que le coût moyen des dépenses de santé pour une entreprise s’élevait désormais à 12% du total et que ces coûts dépassaient de façon signifiative l’inflation.

Mieux former les médecins pendant les études

Il conclut son éditorial en relevant qu’au Brésil en tout cas, mais selon nos informations la situation n’est pas très différente dans les pays francophones qui nous lisent comme la France, le Canada, la Suisse ou la Belgique, les médecins ne sont pas formés pendant leurs études puis par la suite lors de la formation continue à faire des choix financiers et économiques. Comme si c’était un tabou pour le personnel médical. Mais il est évident qu’avec l’espérance de vie qui augmente et une société toujours plus basée sur les services et la valeur ajoutée, en tout cas en Occident, une prise de conscience des médecins s’avère essentielle.
Le Dr Varella estime même que les médecins qui ne prennent pas en compte les coûts pourraient porter préjudice aux plus pauvres dans la société brésilienne. Pour lui, il n’y a plus aucune raison de ne pas prendre l’aspect financier dans la médecine moderne.

Suisse, bon résumé des problèmes

La Suisse parfois considéré comme le pays le plus riche du monde (sans parler des pays de moins d’un million d’habitants comme Monaco) a un système de santé un peu particulier au niveau mondial, chaque citoyen est obligé selon la loi à titre personnel de payer en plus des impôts une assurance maladie. Le coût s’élève souvent à plus de 300 francs par mois, soit plus de 250 euros, par personne. Plus de 60 entreprises se partagent le marché suisse des assurances. Si on fait une moyenne des primes d’assurances que les Suisses devront payer en 2017, celles-ci devraient augmenter bien plus que l’inflation selon des prévisions divulguées ces dernières semaines, soit une augmentation de 4,5%. Quand on sait que la Suisse connaît une inflation de maximum 1% ces dernières années, certaines sources parlent même de récession pendant certains trimestres, on se rend compte de l’impasse totale dans laquelle l’Occident s’oriente.

Innovations de demain

Les start-ups et innovations de demain passeront très probablement par des individus qui vont apporter des réponses concrètes à une question très complexe, le financement des systèmes de santé. Aucun pays ne semble avoir véritablement résolu cette problématique pour le moment. Ce qui est sûr est que la situation devient urgente, faute de quoi, certains systèmes de santé pourraient devenir invivables en terme financier.

N’oubliez pas de laisser vos commentaires en bas de l’article.

Le 26 novembre 2016. Par Xavier Gruffat (Pharmacien Dipl. EPF Zurich, Dipl. MBA). Sources : Folha de S.Paulo (édition du 26 novembre 2016), Swissinfo.ch

2 thoughts on “EDITORIAL : Coûts de la santé privé ou publique, à la fin c’est nous qui payons”

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Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 28.11.2016
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