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Pourquoi le coronavirus a-t-il muté et l’apparition d’un variant échappant entièrement à la vaccination est très peu probable ?

BOSTON Avec l’apparition du variant Delta dans de nombreuses régions du monde où il devient fortement majoritaire, la crainte est la possible apparition de variants encore plus dangereux et surtout résistants aux vaccins. Ce cas de figure semble toutefois peu crédible pour la majorité des scientifiques, comme l’explique en août 2021 un article du site Internet américain sur la santé STAT. Un chercheur de l’Ecole Polytechnique de Zurich (ETHZ) en Suisse se montre toutefois plus pessimiste, même s’il estime qu’avec une troisième dose de vaccin la situation devrait rester sous contrôle.

Variants, des « erreurs » de copie

Le matériel génétique (ADN ou ARN) d’un virus évolue naturellement avec le temps. Chaque nouveau virus est le fruit d’une copie, utilisant dans le cas du coronavirus une cellule humaine. Pendant ce processus de copie des erreurs, de façon hasardeuse, peuvent se produire. Il s’en suit parfois de nouveaux variants du virus menant par exemple à une plus grande contagiosité. En général, la nature privilégie les virus qui peuvent le mieux survivre à leur environnement et pas forcément les plus dangereux. Pour résumer et simplifier, un virus qui tuerait tous ses hôtes (cellules humaines) disparaîtrait également avec eux. Un virus n’a donc pas un intérêt évolutif à forcément devenir le plus dangereux possible, car son « but » est de se multiplier au maximum. Les virus à une chaîne d’ARN comme les coronavirus et ceux de la grippe sont sujettes à de fréquentes mutations. Certains virus évoluent plus vite que d’autres, on estime que les coronavirus mutent plus lentement que les virus de la grippe (influenza).

Variants souvent plus contagieux

Dans le cas du SARS-CoV-2, virus à l’origine de la Covid-19, il a évolué pendant ces 17 derniers mois pour surtout devenir plus contagieux. Par exemple au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis en mars 2020 et pendant plusieurs mois c’était surtout la souche originale dite de Wuhan qui circulait. Puis le variant Alpha (appelé aussi anglais) s’est mis à devenir dominant à la fin 2020 et au début 2021 et finalement depuis quelques mois le variant Delta (appelé aussi indien) a pris le dessus représentant dans certaines régions du monde presque 100% des cas. Chaque nouveau variant majoritaire est en général plus contagieux que le précédent, menant à une quasi-élimination des autres variants. Mais comme on l’a vu, un virus contagieux ne veut pas forcément dire plus dangereux.

Echappatoire du système immunitaire (pas pour le Delta)

Une peur qui revient souvent parmi les scientifiques et la population est une possible résistance de certains variants, y compris des nouveaux, au système immunitaire. Que cela soit à la suite de l’infection naturelle ou à la vaccination certains variants pourraient ne plus être résistants aux anticorps produits par le passé. En anglais, on parle d’un “escape” (échappatoire) immunitaire. Dans un sens c’est que qu’il se passe avec le variant Delta, car des personnes vaccinées semblent être assez nombreuses à être infectées (en anglais on parle de breakthrough infections). Toutefois, ces personnes vaccinées et infectées sont peu nombreuses à être hospitalisées ou à en mourir. Un problème est que plus il y a de personnes infectées ou vaccinées et plus en théorie des variants pouvant échapper au système immunitaire pourraient apparaître. Les variants Béta (Afrique du Sud) et Gamma (Brésil) ont développé des mutations d’échappement du système immunitaire au niveau des anticorps, le variant Delta est beaucoup plus contagieux, mais n’a pas encore développé de mutations d’échappement.

Scénario catastrophe

Un scénario catastrophe serait que le virus mute pour échapper totalement au système immunitaire mais conserve sa létalité et sa contagiosité. Mais selon le site STAT, ce variant « diabolique » est très peu probable. Autrement dit, soit une souche est plus mortelle mais se transmet peu ou elle est très contagieuse mais peu mortelle. Aussi, plus il y a de personnes vaccinées et infectées naturellement et plus l’apparition de ce variant s’avère peu probable. Finalement, un virus comme un coronavirus n’a en général pas la capacité de tellement muter pour qu’il échappe totalement au système immunitaire.
Mais pour Sai Reddy, chercheur de l’ETH Zurich (Ecole Polytechnique Fédérale) en Suisse, un scénario pessimiste est possible ou en tout cas en partie comme il l’a déclaré dans une interview en août 2021. Il met en garde contre une nouvelle super-variante du coronavirus. Pour cet Américain : “Il est très probable qu’une nouvelle variante apparaisse et que nous ne puissions plus compter sur la seule vaccination”. Selon lui nous devons nous préparer à plusieurs vaccinations pour les prochaines années, qui seront continuellement adaptées aux nouvelles variantes.

Vaccins efficaces, mais…

Pour le moment tout indique que les vaccins à ARN (Pfizer, Moderna) sont efficaces contre les différents variants, notamment le Delta, pour prévenir l’hospitalisation et surtout diminuer les risques de décès (réduction d’un facteur 10 par rapport aux non vaccinés). Certains pays ont commencé ou vont commencer à administrer une 3ème dose pour éviter une trop forte diminution des anticorps, notamment car la charge virale du variant Delta est très élevée. De plus, en cas d’apparition de variants encore plus problématiques que le Delta un rappel (booster) ou un nouveau vaccin anti-variant pourrait être injecté. L’optimisme, pour les personnes vaccinées, semble être plutôt de mise. Le scientifique Sai Reddy sonne l’alarme sur de futurs variants : “Si le taux de vaccination n’augmente pas rapidement, seules des mesures restrictives sévères pourront empêcher que des choses plus graves ne se produisent.”

Futur

La plupart des scientifiques estiment que le SARS-CoV-2 devrait d’ici quelques mois, voire au maximum quelques années, devenir un virus respiratoire parmi d’autres, provoquant notamment des rhumes (et refroidissement). On pourrait s’infecter chaque année ou à un plus long intervalle de temps mais en général sans risque sérieux pour la santé.

Le 22 août 2021. Par Xavier Gruffat (pharmacien, dipl. MBA). Sources : STATS, Keystone-ATS, Le Figaro, The Economist, The Wall Street Journal.

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Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 22.08.2021
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