Brésil : plus de 6000 morts de la dengue en 2024 et 2025 s’avère pire

En 2024, le Brésil a compté plus de 6000 morts de la dengue et l’année 2025 devrait être encore pire, selon un article d’un grand média du pays1. Plusieurs causes expliquent cette forte augmentation, à commencer par le réchauffement climatique et les fortes pluies. La dengue est une maladie virale transmise par un moustique. Il existe plusieurs méthodes efficaces pour prévenir la maladie, à commencer par la vaccination.

Amérique latine et surtout le Brésil

En 2023, environ 80% des cas confirmés de dengue dans le monde ont eu lieu en Amérique latine et ses 670 millions d’habitants. En 2025, l’état de Sao Paulo (le plus peuplé du Brésil) comptait 116’550 cas probables de dengue pendant les 5 premières semaines de cette année avec déjà 25 décès confirmés2. Ces dernières années, la dengue touche aussi des pays au climat en général plus frais ou sec comme le Chili et l’Uruguay, selon The Economist.

Virus qui pique la journée

La transmission de la dengue s’effectue par la piqûre d’un moustique – Aedes aegypti – infecté par le virus. Le moustique vit et pique pendant la journée (diurne). Il transmet les virus par la salive en piquant la peau humaine, les virus se multiplient ensuite dans le sang humain. Des symptômes vont apparaître chez environ 40 à 50% des personnes infectées par le virus de la dengue. Autrement dit, 50 à 60% des personnes piquées par un moustique porteur du virus ne présenteront pas de symptôme (asymptomatique).

Photo de larves de moustiques Aedes aegypti (crédit photo : Creapharma.ch)

4 ou 5 sérotypes du virus

Le virus de la dengue compte 5 sérotypes ou souches : DEN1, DEN2, DEN3, DEN4 et DEN5. Certaines sources ou autorités médicales parlent plutôt de 4 sérotypes. Il n’est pas possible d’être infecté une deuxième fois par le même sérotype. L’OMS prévient que les quatre sérotypes de la maladie ont été détectés sur le continent américain en 20243. Mais une personne peut être infectée par l’un des (trois ou) quatre autres sérotypes. Par exemple, on peut être infecté par DEN1, puis quelques semaines, mois ou année après par DEN2, 3 ou 4 ou 5. Mais dans cet exemple un même patient ne peut pas être infecté deux fois dans sa vie par DEN1.

5% à l’hôpital

La dengue n’est pas toujours sans conséquence grave, environ 5% des personnes infectées ont besoin d’un traitement en milieu hospitalier. En effet, certains patients peuvent développer une forme grave de la maladie appelée dengue hémorragique (en anglais : dengue hemorrhagic fever), qui peut être mortelle. Chaque année dans le monde environ 40’000 personnes décèdent de la dengue. Ce chiffre est en forte augmentation ces dernières décennies, selon The Economist. En cas de dengue hémorragique on retrouve les symptômes de la dengue classique, mais des saignements surviennent après la diminution de la fièvre. En cas de dengue hémorragique, il faudra avoir une grande attention et donc consulter immédiatement un médecin en cas d’intenses douleurs abdominales, de cyanose ou de saignements spontanés.

Pas seulement le climat

Même si le réchauffement climatique et les fortes pluies comme dans le sud du Brésil semblent expliquer une grande partie de l’augmentation des cas, il faut relever que l’urbanisme de l’Amérique latine avec de grandes villes comme Sao Paulo, Buenos Aires, Rio de Janeiro, Santiago du Chili, Mexico City ou Lima avec souvent de grandes banlieues pavillonnaires ainsi que des favelas n’aident pas à diminuer le nombre de moustiques. En effet, le moustique se développe beaucoup dans des eaux stagnantes qu’on peut trouver dans ces quartiers, c’est pourquoi on note plus d’infections en banlieue qu’en centre-ville qui compte moins de points d’eau. On peut retrouver de l’eau stagnante dans des vases, des pots, des trous dans la route ou un jardin, des piscines ou sur des toits plats (l’eau s’accumule et peut former des petites piscines). Au Brésil, des villes moyennes dans l’état de Sao Paulo au climat chaud et humide (nord de l’état) sont particulièrement frappées comme Araçatuba ou São José do Rio Preto. Au Brésil, le sérotype 3 (DEN3) circule actuellement de façon importante. Pendant des décennies, ce sérotype n’était pas transmis par les moustiques. Il s’en suit un taux de décès plus important comme cette souche de virus infecte des personnes déjà infectées par un autre sérotype (ex. 1, 2, 4 ou 5) mais qui n’ont jamais été en contact avec DEN3.

Vaccins

Il existe plusieurs vaccins sur le marché pour prévenir la dengue. L’un s’appelle QDenga® (ou Qdengua®), il est indiqué dans l’Union Européenne pour la prévention de la dengue chez des personnes âgées de 4 ans ou plus (au Brésil le vaccin est enregistré pour les personnes âgées de 4 à 60 ans4). Ce vaccin contient des virus vivants atténués de la dengue5. Toutefois ce vaccin n’est pas produit à grande échelle et n’est pas disponible dans toute l’Amérique latine. Au moins un projet de vaccin est à un stade avancé d’étude clinique. Le vaccin Dengvaxia® de Sanofi est aussi disponible mais peut s’avérer dangereux pour des personnes n’ayant jamais eu la dengue. Au Brésil, selon l’Anvisa (l’agence de régulation), la notice d’emballage du vaccin Dengvaxia® précisait en janvier 2022 que le Dengvaxia® doit être appliqué chez les adultes, les adolescents et les enfants âgés de 9 à 45 ans ayant déjà été infectés par la dengue et vivant dans les zones endémiques.
L’OMS a préqualifié le 10 mai 2024 un vaccin contre la dengue, le TAK-003, fabriqué par le groupe pharmaceutique japonais Takeda. Il rassemble des composantes affaiblies de quatre sérotypes du virus qui provoque cette pathologie. L’OMS recommande son utilisation auprès des enfants de 6 à 16 ans dans des environnements avec une prévalence et une propagation importantes de la dengue. Le vaccin doit être administré avec deux doses et une pause de trois mois entre les deux. Il pourra désormais être utilisé par les agences onusiennes dans leurs efforts.

Autres moyens de prévention

Un autre moyen de prévention développé à grande échelle notamment à Singapour consiste à injecter des bactéries appelées wolbachia dans les oeufs des moustiques, avant de les relâcher dans la nature. Avec cette méthode les moustiques sont moins porteurs du virus à l’origine de la dengue, réduisant le nombre de cas d’infections d’environ 75%. Singapour relâche 5 millions de moustiques avec ces bactéries chaque semaine. Mais cette méthode est chère, probablement trop coûteuse pour la situation économique de l’Amérique latine. Dans cette région du continent américain, les meilleurs moyens de prévention consistent à alerter la population de ne jamais avoir de l’eau stagnante. Les autorités de santé font souvent des campagnes d’information générales ou ciblées. Il est notamment conseillé de mettre du sable dans les soucoupes des pots de plantes, de retourner les bouteilles en mettant le goulot vers le bas, de couvrir les réservoirs d’eau et les piscines (ou mettre du chlore) ainsi que d’éviter de stocker des pneus dehors.

Le 10 février 2025. Par Xavier Gruffat (pharmacien).

5 informations intéressantes à connaître sur la dengue

Références scientifiques et bibliographie :

  1. Journal O Estado de S.Paulo, édition papier du 10 février 2025
  2. Journal O Estado de S.Paulo, édition papier du 10 février 2025
  3. Journal O Estado de S.Paulo, édition papier du 4 juin 2024
  4. Journal O Estado de S.Paulo, édition papier du 10 février 2025
  5. Pharmavista.ch, Dengue : vaccin tétravalent autorisé, le 21 décembre 2022
Inscrivez-vous à notre newsletter (gratuit)     Lire aussi :
Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 10.02.2025
Publicité