Alzheimer : la découverte de mycoses relance la piste infectieuse

Alzheimer : la découverte de mycoses relance la piste infectieuseLONDRES / MADRIDDes mycoses, des infections provoquées par des champignons microscopiques, pourraient être impliquées dans la maladie d’Alzheimer. Des travaux de chercheurs espagnols relancent l’hypothèse d’une piste infectieuse dans cette maladie neurodégénérative contre laquelle il n’y a toujours pas de traitement.
“Il n’existe pas de preuve concluante, mais si la réponse était oui, Alzheimer pourrait être ciblée par des traitements antifongiques”, écrit une équipe de chercheurs espagnols dans une étude publiée jeudi dans la revue Scientific Reports (groupe Nature).
L’étude est publiée un mois après un article britannique qui avait suscité la crainte du grand public et les interrogations des spécialistes en lançant l’hypothèse d’une transmissibilité de la maladie.

En comparant des tissus cérébraux prélevés post mortem sur onze personnes atteintes d’Alzheimer et sur dix personnes ne présentant pas la maladie, Luis Carrasco, du centre de biologie moléculaire de Madrid, et son équipe ont découvert des structures signant la présence de différents types de champignons chez tous les malades d’Alzheimer sans exception, mais pas chez les non-malades.

Ils précisent avoir détecté ces traces dans différentes parties du cerveau des malades, y compris dans les vaisseaux sanguins, ce qui pourrait expliquer les pathologies vasculaires souvent observées chez les malades d’Alzheimer.

Hypothèse infectieuse relancée

“Collectivement, nos travaux fournissent des preuves irréfutables de la présence de mycoses dans le système nerveux central de malades atteints d’Alzheimer”, soulignent-ils dans l’article, estimant que leur découverte relance l’hypothèse d’une origine infectieuse de la maladie.

Les champignons pourraient expliquer pourquoi la maladie progresse lentement et pourquoi les patients présentent des inflammations chroniques et une activation de leur système immunitaire.

Mais ils n’excluent pas non plus que les malades d’Alzheimer puissent, pour diverses raisons (modifications dans leur hygiène ou leur alimentation, système immunitaire moins performant), être plus sensibles aux mycoses.

“C’est une étude intéressante et pas du tout invraisemblable mais qui doit être confirmée par une autre équipe”, relève pour sa part le Pr Christophe Tzourio, neurologue et directeur l’unité de recherche neuroépidémiologie de l’Inserm/Université de Bordeaux.

L’hypothèse d’une infection qui pourrait être à l’origine d’Alzheimer n’est pas nouvelle. Des chercheurs ont émis l’hypothèse que le virus de l’herpès ou le chlamydia pneumoniae, un germe à l’origine d’infections respiratoires traînantes, puissent jouer un rôle dans cette maladie, mais cela n’a pas été confirmé par la suite, rappelle-t-il.

“Nous ne savons pas si les mycoses sont survenues avant ou après l’apparition d’Alzheimer”, note pour sa part le Dr Laura Phipps, du centre britannique de recherche sur Alzheimer.

Conjonction de facteurs

La maladie d’Alzheimer touche principalement les personnes âgées. Elle conduit à une détérioration des capacités cognitives et entraîne progressivement une perte d’autonomie. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 47,5 millions de personnes souffriraient de démences dans le monde, dont 60% à 70% de la maladie d’Alzheimer.

La plupart des experts s’accordent à dire qu’il s’agit d’une maladie complexe et qu’il faut généralement “une conjonction” de facteurs pour que quelqu’un développe les lésions spécifiques que sont le développement de plaques amyloïdes et l’accumulation de protéines Tau anormales à l’intérieur des neurones.

Parmi les facteurs de risque connus, figurent, outre l’âge, l’hypertension artérielle, l’obésité, le tabagisme ou la sédentarité, ainsi que des prédispositions génétiques. Les recherches se sont intensifiées ces dernières années pour mieux comprendre la maladie et surtout découvrir un traitement curatif.

Dans un article publié par Nature le mois dernier, le spécialiste londonien des maladies neurodégénératives John Collinge avait avancé l’hypothèse d’une autre forme de transmissibilité après avoir retrouvé à l’autopsie l’une des deux signatures de la maladie – les plaques amyloïdes -, chez des malades morts de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ).

ATS, 15 octobre 2015, Photo illustration : © Monkey Business

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Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 17.09.2017
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