Antidépresseurs

Classes d’antidépresseurs

Les antidépresseurs sont des médicaments qui permettent de lutter contre la dépression (dépression nerveuse). On distingue aussi les antidépresseurs selon leur génération (lire davantage ci-dessous).
Les principaux antidépresseurs sont :
– les tricycliques (aussi appelés ATC), par ex. l’amitryptiline, l’imipramine, la clomipramine, la nortriptyline ou la doxépine. Ces molécules ou médicaments sont relativement efficaces, attention toutefois aux effets secondaires provoquant sécheresses de la bouche et des yeux, constipation, prise de poids, somnolence, etc.
– les IMAO (Inhibiteurs de la Mono Amine Oxydase). Des molécules de cette classe sont par exemple l’iproniazide (premier antidépresseur mis sur le marché), la phénelzine, la tranylcypromine ou la sélégiline (IMAO de type B, utilisé surtout dans la maladie de Parkinson). Le médecin devrait choisir de préférence un IMAO qualifié de réversible.
Ces molécules ou médicaments sont relativement efficaces, attention toutefois aux effets secondaires provoquant prise de poids, somnolence, anxiété, etc.
Arthrose– les sérotoninérgiques ou inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS ou IRS) comme le citalopram, l’escitalopram, la fluoxétine (le premier ISRS disponible sur le marché), la fluvoxamine, la sertraline ou la paroxétine. En 2020, au Royaume-Uni il y avait 6 molécules différentes sur le marché appartenant aux ISRS, les 6 mentionnées dans la phrase précédente1. Lire aussi : Rien ne prouve que la dépression soit causée par de faibles niveaux de sérotonine (étude de juillet 2022)
Au niveau physiologique les ISRS inhibent l’action de la protéine qui transporte la sérotonine, ce qui favorise une augmentation de sa concentration dans la fente synaptique (espace entre deux cellules nerveuses).
Les ISRS sont des médicaments efficaces et très prescrits contre la dépression. Cette classe de médicaments peut néanmoins mener à des effets secondaires comme : insomnie, nausées ou dysfonction érectile chez l’homme ainsi que des troubles cardiovasculaires.
> la vortioxétine. Dans certains pays la molécule vortioxétine (en Suisse vendu sous le nom de marque Brintellix® et aux Etats-Unis sous le nom de marque Trintellix®) est disponible sur ordonnance en pharmacie. Ce médicament est notamment indiqué en cas de dépression majeure (en anglais Major Depressive Disorder ou MMD). Il s’agit d’un antidépresseur qui agit de façon multimodale notamment comme inhibiteur du transport de la sérotonine (5-HT) mais aussi par modulation directe de l’activité des récepteurs sérotoninergiques. La vortioxétine appartient à la grande famille des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS). Ce médicament est notamment vendu sous forme de comprimés ainsi qu’en solution buvable.
– les médicaments antidépresseurs dits de nouvelle génération ou parfois aussi appelé de “2e génération”, il s’agit de nouveaux médicaments avec parfois moins d’effets secondaires et avec une action rapide, on parle aussi parfois d’antidépresseurs atypiques. Dans cette classe de médicaments on peut compter la venlafaxine, la duloxétine, la bupropione, la milnaciprane, la levomilnaciprane ou la desvenlafaxine.
La venlafaxine, la desvenlafaxine, la milnaciprane, la levomilnaciprane et la duloxétine appartiennent à la classe de médicaments appelés inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (ISRN, en anglais SNRIs).
La bupropione appartient aux inhibiteurs sélectifs de la recapture de la norépinéphrine et de la dopamine (IRND, en anglais NDRIs). La bupropione est l’un des rares antidépresseurs qui n’affectent pas la sexualité.
– des médicaments atypiques, qu’il est difficile de classer sont le trazodone (en Suisse nom de marque est Trittico® et génériques), la mirtazapine ou le vilazodone.
– la kétamine et ses dérivés comme l’eskétamine (lire aussi ci-dessous pour plus d’informations sur la kétamine).
Pour la première fois en plus de 30 ans, un nouveau traitement contre la dépression a été approuvé en 2019 aux Etats-Unis par la FDA, l’agence de régulation des médicaments. La molécule active est l’eskétamine (en anglais : esketamin), un dérivé de la kétamine, et porte le nom commercial de Spravato®. Il s’agit d’un spray nasal pour les patients chez qui d’autres antidépresseurs ne sont pas ou plus efficaces. Toutefois, il ne peut être pris que sous surveillance médicale stricte. L’eskétamine est administré par voie intranasale et absorbé dans la circulation sanguine par la muqueuse nasale.
L’eskétamine est étroitement lié à la kétamine, un anesthésique, qui est aussi utilisée pour son effet hallucinogène lors de fêtes. Il est connu dans le milieu de la nuit comme “Special K”. Contrairement aux antidépresseurs traditionnels, l’eskétamine a un début d’action rapide de l’ordre de quelques heures et un mécanisme d’action différent. Pour prévenir l’abus du Spravato®, les patients doivent prendre le médicament dans le cabinet d’un médecin ou dans un établissement médical et ne sont pas autorisés à le prendre chez soi. Les antidépresseurs classiques actuellement sur le marché comme la fluoxétine (le fameux Prozac®) agissent sur les neurotransmetteurs comme la sérotonine, mais la plupart de ces médicaments prennent au moins quatre semaines pour produire un effet et ne sont pas suffisamment efficaces chez environ 30 à 40 % des patients souffrant de dépression grave. Dans un essai clinique cité par le New York Times, l’intérêt du Spravato® semble principalement efficace pour diminuer le taux de rechutes. Une étude portant sur la récidive a montré qu’après avoir pris le Spravato®, environ 25% ont rechuté (dépression à nouveau) contre 45% chez les participants ayant pris un placebo.

Classe selon les générations d’antidépresseurs 
Les médecins et autres spécialistes de la santé distinguent souvent les antidépresseurs en fonction de leur génération. Dans les années 2020, ce sont surtout les antidépresseurs dits de “2e génération” ou de “nouvelle génération” qui sont prescrits. Parmi les antidépresseurs de “2e génération” on compte les ISRS, les ISRN et les IRND. Les antidépresseurs de “1ère génération” sont les tricycliques (ATC) ou les IMAO, ils sont moins prescrits à cause d’un risque plus élevé d’effets secondaires. En général, les antidépresseurs de “1ère génération” sont utilisés lorsque les antidépresseurs de “2e génération ou de nouvelle génération” s’avèrent peu efficaces.

Choix d’une molécule 
L’étude STAR*D2, la plus grande étude réalisée sur les antidépresseurs, datant des années 2000 a constaté que 50% des participants voyaient leurs symptômes de dépression s’améliorer après la prise d’une première ou d’une deuxième molécule antidépressive. Et presque 70% des patients n’avaient plus de dépression après l’essai d’une éventuelle 4ème molécule. Autrement dit, si les symptômes ne s’améliorent pas après plusieurs mois, il est important que votre médecin change de molécule (médicament) jusqu’à trouver le bon traitement.

Effets secondaires et contre-indications 
Les effets secondaires et contre-indications varient en fonction de chaque médicament (molécule).
On sait par exemple que les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) augmentent le risque de chute et de fracture chez les personnes âgées, en tout cas une association a été constatée. Certaines études ont aussi montré une association entre la prise d’ISRS et le développement de la maladie d’Alzheimer.
Veuillez lire la notice d’emballage et demandez conseil à votre médecin ou pharmacien. Découvrez plus d’informations sur les effets secondaires des antidépresseurs ci-dessous.

Utilisation des antidépresseurs à long terme et risque pour la santé
Aux Etats-Unis, environ 25% des personnes prenant des antidépresseurs en consomment depuis plus de 10 ans, selon un article du Wall Street Journal publié en août 2019 et citant des données du National Center for Health Statistics (Etats-Unis). Le problème est que la majorité des études ont suivi les patients pendant seulement quelques années et non pas plus de 10 ans ou des décennies. Autrement dit, les données scientifiques manquent pour connaître les éventuels risques pour la santé d’une consommation à long terme. Cela dit, pour les personnes à tendance suicidaire, une prise d’antidépresseurs à long terme est probablement plus bénéfique que néfaste, car il n’existe pas toujours des alternatives efficaces (ex. psychothérapie seule).
Taux de mortalité des antidépresseurs 
Infarctus du myocarde chez la femme, 5 informations essentielles à connaîtreUne étude canadienne, ou plutôt une méta-analyse ayant prise en compte 17 études, publiée en 2017 a montré que la prise d’antidépresseurs sur une longue période augmentait le taux de mortalité. On sait que la majorité des antidépresseurs bloquent l’absorption de sérotonine par les neurones. Mais il faut savoir que la majorité des organes (coeur, reins, foie, poumons) utilisent la sérotonine provenant de la circulation sanguine. Le problème est que les antidépresseurs bloquent également l’absorption de la sérotonine dans ces organes. Les chercheurs mettent en garde que les antidépresseurs pourraient augmenter le risque de mortalité en empêchant les organes de fonctionner correctement. Les chercheurs de l’Université McMaster au Canada ont passé en revue (review en anglais) des études prenant en compte des centaines de milliers de personnes. Ils ont découvert que ceux qui prenaient des antidépresseurs avaient un risque de mortalité 33% plus élevé que ceux ne prenant pas ces médicaments. Ceux prenant des antidépresseurs avaient aussi 14% plus de risque de souffrir d’événements cardiovasculaires comme un AVC ou un infarctus du myocarde. Les chercheurs ont toutefois découvert que pour les personnes souffrant de maladie cardiaque ou de diabète, les antidépresseurs n’augmentaient pas le taux de mortalité. Les antidépresseurs ont des effets fluidifiants (du sang) qui sont utiles dans le traitement de ces maladies. Cette étude a été publiée le 14 septembre 2017 dans le journal scientifique Psychotherapy and Psychosomatics (DOI : 10.1159/000477940).

Les antidépresseurs augmentent le risque de suicide (étude)
La dépression, une maladie souvent sous-estimée
Les antidépresseurs prennent un certain temps pour produire l’effet désiré, souvent quelques semaines. Au début, ils augmentent même le risque de suicide en comparaison avec un placebo, comme l’ont montré une étude de chercheurs suisses de la Haute école spécialisée zurichoise (ZHAW) et de chercheurs autrichiens de l’Hôpital universitaire de psychiatrie, de psychothérapie et de psychosomatique de Salzbourg. Leur étude a été publiée online le 24 juin 2019 dans le journal spécialisé Psychotherapy & Psychosomatics (DOI : 10.1159/000501215). Selon leur étude métastatique (étude d’études), le risque de suicide avec des antidépresseurs augmente de 2,5 par rapport au traitement par placebo. Pour arriver à ces résultats, les chercheurs ont évalué les données d’études sur les antidépresseurs qui ont été examinées par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis entre 1987 et 2013 pour approbation de commercialisation (mise sur le marché). Les études ont montré que 0,8 % des patients recevant des antidépresseurs se sont suicidés ou ont fait une tentative de suicide. Dans le groupe témoin avec placebo, le chiffre n’était que de 0,3%. Selon les calculs des chercheurs, un patient sur 202 traités aux antidépresseurs dans les essais cliniques a probablement subi une tentative de suicide qui n’aurait probablement pas eu lieu sans le médicament. Les scientifiques appellent donc à plus de prudence de la part des médecins et à une meilleure information des patients sur les risques. [avec des informations de Keystone – ATS, Pharmapro.ch – site partenaire de Creapharma.ch – est client de cette agence de presse suisse en allemand]

Remarques importantes sur les antidépresseurs

– La plupart du temps, les antidépresseurs ne font pas effet immédiatement. Ces médicaments nécessitent souvent plusieurs jours (10 à 20 jours) pour que l’effet s’installe. Certaines sources parlent même de semaines jusqu’à 2 mois avant que ces médicaments commencent véritablement à agir. Restez donc patient et demandez conseil à votre pharmacien ou médecin si les effets sont trop importants ou au contraire trop faibles. Une étude de 2023 estime qu’une raison pour laquelle les antidépresseurs mettent des semaines à faire effet provient du fait que les antidépresseurs favorisent dans le cerveau la création de nouvelles synapses (connexions) entre les neurones3, ce qui prend des semaines.
Une alternative à l’utilisation d’antidépresseurs chimiques (médicaments) est la privation de sommeil (lire davantage à ce sujet sur notre dossier complet sur la dépression dans la rubrique Traitements). Cette méthode permet une efficacité rapide avec une amélioration des symptômes de la dépression souvent déjà dans les 24 heures.

– Chez environ 20% à 40% des patients, les traitements classiques (médicaments ou psychothérapie) n’ont aucun effet. C’est pourquoi le médecin devra se tourner davantage vers des traitements plus originaux (impulsion électrique ou magnétique). Un article publié dans The Economist le 14 janvier 2023 était encore plus critique sur l’efficacité des antidépresseurs, en estimant que seulement 15% des patients voient un effet antidépresseur supérieur à un placebo. Cette basse efficacité est basée sur une étude publiée en août 2022 dans le BMJ (doi : 10.1136/bmj-2021-067606). 

– Des chercheurs allemands ont montré que chaque personne réagissait différemment à la prise d’antidépresseurs, du moins avec ceux qui ont été testé (citalopram et amitryptiline). Cette différence serait due à une expression génétique différente.

– Sur le marché, on estime qu’il existe 30 à 40 molécules antidépresseurs. Ces prochaines années, les psychiatres s’attendent à accueillir peu de nouvelles molécules. En effet, l’industrie pharmaceutique a de la peine à trouver des nouveaux traitements efficaces.

Fréquence d’utilisation des antidépresseurs
– Dans les pays occidentaux, environ 10% de la population adulte consomme des antidépresseurs4.
– Aux Etats-Unis, une analyse a montré qu’en moyenne 13% des Américains âgés de plus de 12 ans prenaient des antidépresseurs dans le mois précédent au moment d’un sondage (NCHS survey) réalisé entre 2011 et 2014. Entre 1999 et 2002, ce même sondage arrivait à 7,7%. En un peu moins de 15 ans, l’augmentation du nombre d’Américains affirmant prendre des antidépresseurs a fortement augmenté. En 2022, un article de l’Harvard Medical School confirmait que près de 13% des adultes américains – dont deux tiers de femmes – prenaient des antidépresseurs.
Suisse
– En 2020, en Suisse les antidépresseurs étaient de loin les médicaments le plus souvent délivrés dans la grande famille des psychotropes5. Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) étaient de loin le sous-groupe d’antidépresseurs les plus consommés en Suisse en 2020 représentent près de 60% de tous les antidépresseurs délivrés6. La part des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine
et de la noradrénaline (IRSN) s’établissait à près de 20% et celle des nouvelles molécules à 10%, comme celle des antidépresseurs noradrénergiques et sérotoninergiques spécifiques (NaSSA).

Kétamine, traitement alternatif

La kétamine (lire aussi ci-dessus avec un nouveau médicament autorisé par la FDA en 2019), à la base une molécule utilisée comme anesthésique général, peut aussi être utilisée contre la dépression. Le psychiatre américain Dr Carlos Zarate a fait des expériences positives avec cette molécule pour lutter contre la dépression. La kétamine agit sur la régulation du neurotransmetteur glutamate. Un déséquilibre du niveau de glutamate  dans le cerveau est associé à la dépression.

– En 2017, une équipe du département de pharmacie de l’Université de Californie à San Diego a analysé une banque de données de la FDA (FDA Adverse Effect Reporting System) de patients souffrant de symptômes de dépression et prenant de la kétamine pour lutter contre la douleur.
Les scientifiques californiens ont découvert que la dépression était 2 fois moins fréquente parmi les 41’000 patients prenant de la kétamine, en comparaison avec les patients qui ont pris un autre médicament ou un ensemble de médicaments contre la douleur.
Comme le rapporte les chercheurs de San Diego dans un communiqué de presse de l’étude en mai 2017, la kétamine est une molécule plutôt bon marché. Cette étude a été publiée le 3 mai 2017 dans le journal scientifique Scientific Reports.
– Une étude australienne publiée en juin 2017 dans la revue scientifique American Journal of Geriatric Psychiatry a montré que la kétamine était efficace chez des personnes dépressives âgées de 60 ans ou plus qui ne réagissaient pas à d’autres types de traitement contre la dépression. L’étude comprenait 16 participants, 14 ont terminé la procédure. Sur ces 14 participants, les chercheurs ont noté que 7 étaient en rémission après un traitement à la kétamine et 5 avec des doses de kétamine inférieures à 0,5mg/kg. Il s’agissait d’une étude en double aveugle, contrôlée, avec multiple-croisement et un suivi de 6 mois.

Kétamine et diminution des pensées suicidaires
Une étude publiée online le 5 décembre 2017 dans le journal scientifique American Journal of Psychiatry (DOI : 10.1176/appi.ajp.2017.17060647) a montré que la kétamine permettait de diminuer les pensées suicidaires. Des antidépresseurs classiques peuvent aussi diminuer les pensées suicidaires mais ils mettent souvent plusieurs semaines avant d’agir, c’est pourquoi la kétamine semble être une alternative intéressante. Cette étude menée par la Columbia University Medical Center à New York a montré que la kétamine était de façon significative plus efficace pour réduire les pensées suicidaires chez des patients dépressifs qu’un sédatif couramment prescrit, le midazolam. Les chercheurs américains ont aussi découvert que l’effet anti-suicide de la kétamine apparaissait seulement quelques heures après son administration (en injection).

Traitement de la dépression à base d’anti-inflammatoires

Comme on l’a vu dans la rubrique causes, la dépression pourrait avoir une origine inflammatoire chez environ 40% des patients. Ceux-ci et seulement ceux qui présentent une quantité anormale de molécules inflammatoires (cytokines, protéine C réactive) dans leur sang peuvent profiter de l’effet anti-inflammatoire de certains médicaments. Autrement dit, chez les patients qui n’ont pas de molécules inflammatoires en excès dans leur sang, un traitement à base d’anti-inflammatoires est inefficace.

Les traitements utilisés pour soigner la dépression chez les individus avec un profil inflammatoire sont surtout des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l’aspirine et le célécoxib. Dans certains cas, les médecins ont observé qu’après quelques jours de traitement à base d’AINS les symptômes dépressifs étaient nettement réduits.

Historique des antidépresseurs

Le premier antidépresseur, l’iproniazide (un IMAO) est apparu dans les années 1950, il a été mis sur le marché en 1958. Cette molécule était à l’origine destinée à lutter contre la tuberculose, un “bonheur inapproprié” ou une certaine euphorie chez les patients utilisant ce médicament a donné l’idée aux scientifiques et médecins d’utiliser cette molécule pour soigner la dépression. Pour plus d’informations cliquez-ici (en anglais)

Marché des antidépresseurs

Au niveau mondial, le marché des médicaments antidépresseurs est évalué à environ 12 milliards de dollars par année, selon un article du New York Times paru en mars 2019.

Dépression et magnésium (étude)

Une étude publiée en juin 2017 a montré que le magnésium consommé sous forme de complément alimentaire en comprimé était autant efficace pour soigner la dépression légère à modérée que des antidépresseurs classiques souvent utilisés comme les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) comme le citalopram ou la fluoxétine. Dans cette étude clinique randomisée, une partie des 126 patients souffrant de dépression légère à modérée ont reçu 248 mg de magnésium élémentaire (500 mg de chlorure de magnésium) par jour pendant une période de 6 semaines ou aucun traitement. Les chercheurs ont découvert que chez 112 participants avec des données utilisables, la consommation de chlorure de magnésium pendant 6 semaines a mené à une amélioration significative au niveau clinique dans la mesure des symptômes de la dépression et de l’anxiété. Un autre résultat intéressant de cette étude était que l’effet antidépresseur du magnésium apparaissait rapidement, déjà après 2 semaines de traitement et sans mener à des effets secondaires significatifs. Cette étude a été réalisée par une équipe de l’Université du Vermont aux Etats-Unis et publiée dans la revue spécialisée PLoS One (DOI : 10.1371/journal.pone.0180067) le 28 juin 2017. Lire davantage : Le magnésium serait autant efficace que des antidépresseurs couramment utilisés

Utilisation d’antidépresseurs chez les jeunes (enfants et adolescents)

Une revue d’étude (méta-analyse ou méta-étude) réalisée par des chercheurs de l’Université de Bâle en Suisse et de l’Université d’Harvard (Harvard Medical School) aux Etats-Unis en 2017 a montré que la prise d’antidépresseurs chez les jeunes souffrant de maladies psychiques comme la dépression ou l’anxiété n’était pas beaucoup plus efficace qu’un placebo tout en menant à des effets secondaires. Pour arriver à ces conclusions, les scientifiques ont passé en revue (review) 36 études différentes représentant des données d’environ 6’800 enfants et adolescents jusqu’à l’âge de 18 ans.  De façon un peu surprenante, les chercheurs suisses et américains ont aussi constaté que lors d’anxiété les antidépresseurs étaient plus efficaces que lors de dépression.
Les antidépresseurs utilisés dans cette méta-étude étaient des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (SSRI) et des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (SNRI). Cette étude a été publiée le 30 août 2017 online dans le journal scientifique JAMA Psychiatry (DOI : 10.1001/jamapsychiatry.2017.2432).

Dépression post-partum

– La FDA, l’agence de régulation des médicaments aux Etats-Unis, a approuvé le mardi 19 mars 2019 le Zulresso (brexanolone, des laboratoires laboratoire Sage Therapeutics) par voie intraveineuse (IV) pour le traitement de la dépression post-partum chez les femmes adultes. Il s’agit du premier médicament approuvé par la FDA spécifiquement contre la dépression post-partum. Cette forme de dépression est une maladie sérieuse qui, lorsqu’elle est grave, peut mettre la vie en danger. Les femmes peuvent avoir des pensées de se faire du mal ou de faire du mal à leur enfant, comme le relève dans un communiqué la FDA. La dépression post-partum est un épisode dépressif majeur qui survient après l’accouchement, bien que les symptômes puissent apparaître pendant la grossesse.
A cause de risques d’effets secondaires graves, le Zulresso n’est offert aux patients que dans le cadre d’un programme de distribution restreinte dans des établissements de soins de santé agréés où le fournisseur de soins de santé peut surveiller attentivement le patient. Le Zulresso est administré en perfusion IV continue pendant 60 heures (2,5 jours). Son avantage réside justement dans le fait qu’il agit rapidement, soit en moins de 3 jours. Les antidépresseurs classiques mettent souvent des semaines avant de faire effet. L’efficacité du Zulresso a été démontrée dans deux études cliniques. Les effets secondaires les plus fréquemment signalés par les patients traités avec Zulresso dans les essais cliniques étaient la somnolence, la sécheresse de la bouche, la perte de conscience et les bouffées de chaleur. Selon une étude des CDC américains, 11,5% des nouvelles mères souffraient de dépression post-partum en 2012 aux Etats-Unis, comme le relève l’agende de presse suisse ATS.

Arrêt des antidépresseurs (symptômes de sevrage)

L’arrêt d’un traitement à base d’antidépresseurs n’est pas toujours sans conséquence, jusqu’à un tiers des personnes prenant ces médicaments souffrent d’un sevrage des antidépresseurs (en anglais on parle d’antidepressant discontinuation syndrome)7. Toutefois, une vaste étude allemande de l’Université de Cologne publiée en juin 2024 dans The Lancet Psychiatry8 estime plutôt à 15% le nombre de personnes souffrant d’un sevrage à l’arrêt d’un antidépresseur. Le nombre de personnes avec des symptômes graves a été évalué par ces chercheurs de Cologne à 3%. Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont pris en compte 79 essais cliniques incluant 21’000 patients.
Symptômes de sevrage
Les symptômes de sevrage ou de manque d’antidépresseurs peuvent inclure des maux de tête, des vertiges, de la fatigue, de l’irritabilité, des nausées ou vomissements, des rêves vifs, des troubles du sommeil ou ressentir des symptômes comme la grippe. En anglais un mnémonique astucieux explique les symptômes de sevrage les plus courants lors d’un arrêt soudain des antidépresseurs, c’est le FINISH9. Avec F pour syndrome pseudo-grippal (flu – grippe – en anglais pour le F) qui implique des maux de tête, des douleurs articulaires et musculaires, et de la fatigue, I pour insomnie, N pour nausée, I pour déséquilibre (en anglais imbalance), qui peut inclure des vertiges ou des étourdissements, S pour troubles sensoriels tels que des picotements ou des sensations semblables à des chocs électriques que certaines personnes décrivent comme des “zaps” cérébraux et H ou hyperexcitation, définie comme le fait de se sentir énervé, irritable ou anxieux. D’autres symptômes sont aussi possibles.
Causes du sevrage
Ce ne sont pas directement les antidépresseurs qui sont addictifs, mais ces médicaments perturbent certains neurotransmetteurs comme la sérotonine dans le cerveau, c’est en tout cas l’hypothèse souvent avancée. Le corps a donc besoin de quelques jours ou semaines pour se réadapter à cette nouvelle situation, sans l’influence des antidépresseurs.
Augmentation de la fréquence
On sait que les symptômes de manque ou sevrage surviennent lors d’une thérapie par antidépresseurs de plus de 6 semaines et aussi lors d’un dosage élevé. En général, les symptômes de manque sont modérés ou faibles et durent seulement quelques jours (max. 2 semaines) après l’arrêt des antidépresseurs. Une possibilité pour diminuer ces symptômes de manque est de demander au médecin, si c’est possible, de diminuer progressivement la dose de l’antidépresseur pendant quelques semaines avant l’arrêt total. Il semble que les médicaments à base de paroxétine, d’imipramine ou venlafaxine mènent à plus de symptômes de sevrage lors d’arrêt de prise d’antidépresseurs que d’autres médicaments comme la fluoxétine ou la sertraline.
Bons conseils, alternatives
– Une possibilité lors d’arrêt d’un traitement à base de paroxétine ou venlafaxine est que le médecin prescrive pendant quelques semaines un autre antidépresseur comme la fluoxétine avant l’arrêt définitif. Il devrait y avoir moins de symptômes de manque (sevrage).
– Il est conseillé de ne pas arrêter de prendre des antidépresseurs à un moment où quelque chose de stressant se produit dans votre vie.
– La psychothérapie, l’exercice régulier, le sommeil et la socialisation avec d’autres personnes sont autant de moyens d’intervention puissants qui sont comparables aux médicaments contre la dépression.

News sur les antidépresseurs :
L’arrêt des antidépresseurs peut entraîner des vertiges et des troubles du sommeil (étude)
Pourquoi les antidépresseurs SSRI mettent-ils des semaines à agir ? (étude)
5 informations importantes sur les antidépresseurs (janvier 2023)
Rien ne prouve que la dépression soit causée par de faibles niveaux de sérotonine (étude de juillet 2022)
Pourquoi les femmes d’âge moyen consomment-elles tant d’antidépresseurs ?
Le magnésium serait autant efficace que des antidépresseurs couramment utilisés

Sources et Références :
Pharmavista.ch, The Wall Street Journal, Keystone-ATS (agence de presse suisse), i.m@il Offizin (publication sur les médicaments de l’Université de Bâle en Suisse), Scientific ReportsPLoS One du 28 juin 2017 (étude sur le magnésium), Mayo Clinic, American Journal of Geriatric Psychiatry , CBSNews.com (consulté le 18 août 2017), Le Matin Dimanche, Pharmawiki.ch, The New York Times, FDA, PHARMA-INFO (journal des pharmaciens du canton d’Argovie, Suisse), “100 wichtige Medikamente” – Infomed (2020), Prescrire, Mayo Clinic, Harvard Medical School (blog).
Etudes :
JAMA Psychiatry (DOI : 10.1001/jamapsychiatry.2017.2432), American Journal of Psychiatry (DOI : 10.1176/appi.ajp.2017.17060647), Psychotherapy & Psychosomatics (DOI : 10.1159/000501215), Psychotherapy and Psychosomatics (DOI : 10.1159/000477940).

Ecriture du dossier : 
Xavier Gruffat (pharmacien dipl. EPF Zurich, Suisse)

Dernière mise à jour du dossier : 
01.07.2024

Références scientifiques et bibliographie :

  1. Site Gov.uk, le site accédé par Creapharma.ch le 17 septembre 2020  marchait à cette date
  2. Voir étude portant sur STAR*D – Sinyor M, Schaffer A, Levitt A. The Sequenced Treatment Alternatives to Relieve Depression (STAR*D) Trial: A Review. The Canadian Journal of Psychiatry. 2010;55(3):126-135. doi:10.1177/070674371005500303
  3. Johansen A, Armand S, Plavén-Sigray P, Nasser A, Ozenne B, Petersen IN, Keller SH, Madsen J, Beliveau V, Møller K, Vassilieva A, Langley C, Svarer C, Stenbæk DS, Sahakian BJ, Knudsen GM. Effects of escitalopram on synaptic density in the healthy human brain: a randomized controlled trial. Mol Psychiatry. 2023 Oct 9. doi: 10.1038/s41380-023-02285-8. Epub ahead of print. PMID: 37814129.
  4. Magazine The Economist, édition du 14 janvier 2023
  5. Observatoire suisse de la santé (Obsan), bulletin publié en avril 2022. Obsan Bulletin « Les médicaments psychotropes en Suisse »
  6. Observatoire suisse de la santé (Obsan), bulletin publié en avril 2022. Obsan Bulletin « Les médicaments psychotropes en Suisse »
  7. Newsletter de la Mayo Clinic, Mayo Clinic Health Letter, page 8, édition de novembre 2021, article consacré justement à l’arrêt des antidépresseurs
  8. DOI : https://doi.org/10.1016/S2215-0366(24)00133-0
  9. Newsletter de la Harvard Medical School, édition d’août 2022

Lire aussi :


Informations sur la rédaction de cet article et la date de la dernière modification: 01.07.2024
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